Des id?s lib?ales dans l'ancienne France

"...Mais que parlons-nous d'aujourd'hui ? Ce moment est d?j? loin de nous; cette poussi?re est tomb?e. Une autre question s'est pos?e d'elle-m?me: pourquoi, tandis que l'Angleterre, avec sa constitution informe et vigoureuse, semble braver toutes les secousses, sommes-nous en France impuissants ? soutenir nos institutions, si bien con?ues en apparence, si rationnelles et si sym?triques ? Aussit?t on se met ? discuter l'aptitude des Fran?ais aux libert?s politiques. Sur ce sujet, des traits cuisants pour l'amour-propre national nous sont encore tous les jours d?coch?s ? plaisir de l'autre c?t? de toutes nos fronti?res. Parmi nous, le f?cheux probl?me s'agite dans la presse, dans les livres, dans la chaire m?me, et la plupart le r?solvent contre nous, les uns avec joie et ironie, comme un beau r?sultat, les autres avec l'amertume du regret. ? peine pos?e toutefois, cette question, comme les autres, remonte dans l'histoire et y cherche son explication. Est-il donc vrai que nous soyons tout ? fait incapables du plus noble privil?ge de la nature humaine, de celui qui fait son excellence, de celui qui, dans l'ordre politique, correspond au libre arbitre dans l'ordre moral ? Qui nous a inflig? cette d?ch?ance ? Faut-il en vouloir ? l'esprit niveleur et centralisateur de la monarchie, qui, d?s avant 1789, avait ?touff? tous les germes des libert?s anciennes avec les usages et les habitudes qui en faisaient la vie ? Faut-il s'en prendre ? l'esprit exclusif de la noblesse et aux vues ?troites du tiers-?tat, qui n'ont point su s'associer contre les envahissements de l'administration royale et se fondre dans un m?me int?r?t ?..."