Le Coin des Enfants

Angela a une trentaine d'ann?es.

C'est une jeune femme sortie d'un carnet d'exils. On dirait une femme comme toutes les autres. Il n'en est rien. C'est une vagabonde sans visage au verbe haut, sans foi ni loi. N?e de parents Congolais venus d'Afrique, frapp?e d'amn?sie, elle erre tous les jours dans une petite ville de province, au bord de la M?diterran?e. Elle n'existe nulle part ailleurs que dans ses pages o? logent une vie intense, anim?e, hors du commun et la pr?sence des familles d'origines ?trang?res aux destins singuliers. Incandescente et solaire, elle br?le du seul feu nourri par l'imagination de l'auteur. Le cadre de ce r?cit dont la narrativit? semble d?construite n'est pas inscrit dans une objectivit? qui le fige dans une v?rit? d?finitive des choses. Du matin au soir, Angela marche, soliloque; elle est ailleurs, dans son monde.

Ces fragments sont une sorte de ressassement, de pourparlers avec une autre voix, la sienne et d'autres en elle, venues d'ailleurs. C'est une sorte d'invitation ? l'au-del? de l'?tre o? les maux du monde ne semblent plus l'atteindre. Fragments sans composition, uniquement anim?s par la passion du Dehors, sans ligne narrative claire et pr?cise ni structure av?r?e, faits de boutures et d'arborescences, de ruptures et de branchements, ils ont ?t? arrach?s ? la nuit, l'oubli et la mort. La nuit, l'oubli et la mort, enferr?s dans la moindre m?moire d'exil. Est-elle une cartographie du vivant, une topographie, avec des strates et de nombreuses ramifications, c'est toute la Zone, arri?re-canton d'un vaste pays peupl? d'habitants r?els et imaginaires, qui parle en elle, voix impersonnelle. Voix dans de nombreuses voix anonymes.

C'est une fiction narrative, avec son propre rythme, ses lois et ses d?bordements. Mais, avant tout, une longue et riche r?flexion sur les enfants n?s en exil de parents venus d'ailleurs, une plong?e lente et raisonn?e sur les r?ves, les croyances, les espoirs et les d?senchantements de ceux qui les ont pr?c?d?s, sur eux-m?mes et le monde qui les entoure. Ce sont surtout des fragments sans dessein. Ils existent par eux-m?mes, hors de toute cat?gorisation.

Carnet d'exils, d'amours, de douleurs et d'illusions perdues, mais, ? jamais, chemins d'introspection, ils portent un regard serein et fraternel sur les possibles de notre monde en partage.